Un réseau routier très important est mis en place quelques années après la fondation de la ville, afin de relier la capitale des Gaules aux différentes régions des trois Gaules et de la Gaule Narbonnaise. Ce réseau prend certainement, au moins pour partie, la place d’itinéraires gaulois préexistants.
Decumanus et Cardo (-43 av. J.-C)
La fondation d’une ville romaine se faisait en suivant un rituel précis, avec notamment la délimitation d’une enceinte ainsi que le tracé des deux voies principales de la cité, le decumanus maximus selon un axe ouest-est et le cardo maximus selon un axe nord-sud.
Etant donné le relief tourmenté de Fourvière où était implantée la colonie romaine, il est difficile de retrouver ces deux axes originels. Pendant longtemps, on a attribué le Decumanus à la rue Cléberg, du fait de son orientation Est-Ouest. Une autre hypothèse lui est désormais préférée : ce decumanus se retrouverait dans le tracé de l’actuelle rue Roger Radisson, du fait de l’alignement de part et d’autres des nombreux ilots bâtis antiques révélés par l’archéologie et formant la cité selon le principe d’un damier géant.
Le réseau d’Agrippa (- 20 av. J.-C) : 4 voies principales
Selon Strabon, « Agrippa traça les routes à partir de Lyon, la première… vers les pays des Santons et d’Aquitaine, la deuxième vers le Rhin, la troisième vers l’Océan par le pays des Bellovaques et des Ambiens, la quatrième vers… Narbonne et Marseille« .
Si les voies d’Aquitaine, de l’Océan et de Narbonnaise sont historiquement avérées et bien localisées grâce aux différentes campagnes de fouilles préventives, des doutes ont longtemps subsisté sur le tracé de la voie du Rhin. Cette dernière aurait traversé la Saône grâce à un pont à l’emplacement de l’actuelle passerelle Saint-Vincent pour suivre ensuite la rue Sergent Blandan puis la montée des Carmélites.
La voie antique dite du Léman (autre nom donné à la voie du Rhin) a été reconnue en plusieurs points des pentes de la Croix-Rousse. Elle gravissait globalement la colline du sud-ouest vers le nord-est. Si on la replace dans un plan actuel, elle suit le tracé de la rue Sergent Blandan, puis bifurque vers le nord en empruntant l’actuelle rue Fernand Rey, prolongée par la Montée des Carmélites. Elle mesurait environ 4 m de large et était dotée de trottoirs en gravier de chaque côté. Très probablement, elle date du début de la colonie (fondation en 43 avant notre ère) et a été restaurée au cours du IIe siècle.
La voie de Narbonnaise prenait naissance dans la continuité du cardo urbain pour se diriger au sud, en suivant grossièrement le Rhône sur sa rive droite jusqu’à Sainte-Colombe, à proximité de Vienne. Cette voie romaine qui courait en parallèle de la rive droite du Rhône devait reprendre un itinéraire celtique, antérieur à la conquête romaine. Aucun vestige n’a permis de préciser son tracé exact. L’itinéraire d’Antonin indiquait que par cette voie, Lyon se situait à 23 milles de Vienne, soit 35 kms.
La place de Trion : un carrefour des voies
La place de Trion (trivium, « les trois routes ») se situe à l’emplacement d’un carrefour antique important. A cet endroit, la voie romaine descendant de Fourvière se séparait pour donner naissance à la Voie de l’Océan (qui suivait le vallon jusqu’à Gorge de Loup puis Vaise par les rues Pierre Audry, Sergent Michel Berthet, place Valmy, puis rue de Bourgogne), à la Voie d’Aquitaine (rue de la Favorite) , et à une voie desservant les quartiers sud de la ville (rue de Trion).
Ce carrefour, situé à l’extérieur de l’enceinte présumée de la cité, était bordé de nombreux tombeaux et constituait la plus grande nécropole de Lugdunum, celle de Trion.
La voie d’Italie (env. 40 ap. J.-C)
La voie d’Italie ainsi que le compendium sont des itinéraires qui se développent postérieurement au réseau d’Agrippa, probablement dès que Lyon prend une place importante comme carrefour commercial, économique et politique. Cette voie rejoignait au niveau de Bourgoin-Jallieu un tracé initial Vienne-Bourgoin-Aoste-Chambéry.
Cette voie arrivait à Lyon en se confondant au compendium à proximité de l’actuelle rue de l’Université (7ème arrondissement). Le franchissement du Rhône pouvait avoir lieu probablement grâce à un pont situé au niveau du pont de l’Université.
Le compendium Lyon-Vienne (env. 40 ap. J.-C)
Il s’agissait d’un itinéraire Lyon-Vienne empruntant la rive gauche du Rhône, plus court que la Voie Narbonnaise, et passant à proximité de Solaize. Le terme compendium peut donc être traduit par « raccourci ». A Lyon, L’orientation Nord-Sud de la route de Vienne, son tracé rectiligne, sont les héritiers directs de ce compendium.
Une fouille de sauvetage ayant eu lieu au mois d’octobre 1996, 21 et 23 rue Père Chevrier à Lyon 7ème (rive gauche du Rhône) a permis de révéler une portion du départ de cette voie à destination de Vienne. Un tronçon de voie large d’au moins 5,8 mètres y a été dégagé sur une longueur de 7 mètres. A cet endroit, la fouille a également révélé une superposition de 3 chaussées successives constituées de sable, de gravier et de galets tassés, ainsi qu’un fossé de récupération des eaux de pluie.
Par cet itinéraire, Vienne était à 16 milles de Lyon (soit environ 24,3 km), distance figurant dans la Table de Peutinger. Cette fouille a également mis au jour sept sépultures (dont une incinération), confirmant que cette zone si situait dans une zone périphérique extérieure à la cité. Les rites d’ensevelissement interdisaient en effet la mise en sépulture à l’intérieur de l’enceinte sacrée de la ville.
La voie de Suisse
Cette voie empruntait le tracé approximatif suivant : plateau de Caluire, Miribel, Béligneux, Lagnieu, Nantua, Genève.
La Table de Peutinger
La Table de Peutinger est la seule reproduction d’itinéraire peint romain qui soit parvenue jusqu’à nous. Plus qu’une carte, il s’agit d’une représentation figurée des axez routiers et des villes présentes dans l’Empire romain depuis la côte est de la Grande-Bretagne jusqu’à l’embouchure du Gange.
La plus ancienne version de ce document exposé à Vienne daterait de 1265, il s’agit donc d’une copie de copies qui a traversé les ages et dont l’original remonterait à la moitié du 4ème siècle ap. J.-C. A l’origine, la plus sérieuse hypothèse fait dériver la Table de Peutinger de la grande carte de l’Empire romain (Orbis Pictus) qu’Agrippa avait fait peindre sur le mur du portique Vipsania sur le champ de Mars à Rome, sur l’ordre d’Auguste.
Le réseau des voies aurait été reproduit sur un rouleau de parchemin de 6,8 mètres de long et de 0,34 mètres de haut. On y retrouve les les étapes et les distances qui les sépare, le cours des principaux fleuves, les chaînes de montagne et le nom de peuples occupant les différentes régions. Enfin, des vignettes informe le voyageur : deux tours symbolisaient la porte fortifiée d’une ville ceinte de murailles. Un bâtiment rectangulaire à portiques avec une cour centrale annonçait une station thermale.
On remarque un étirement infligé aux contours géographiques, en raison du support déroulable utilisé ainsi que probablement en raison du document d’origine, ce qui rend difficile la lecture du document. Chaque station est marquée par un coude, et porte un chiffre donnant la longueur de l’étape exprimée en lieues gauloises, milles romains, stades ou bien encore parasanges…
C’est précisément à Lyon que la transition entre milles romains et lieues gauloises se faisait. Lyon est mentionnée dans l’indication suivante : Lugdunum caput Galliarum usque hic leugas : « Lyon, capitale des Gaules ; jusque là (on mesure) en lieues ».
– 1 mille romain = 1480 mètres environ
– 1 lieue gauloise = 2220 mètres environ
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