Le 8 décembre reste le premier événement lyonnais en terme de fréquentation et d’attachement des Lyonnais. Des dizaines d’animations et d’illuminations de façades et de monuments se superposent en soirée. A la fois fête religieuse, fête populaire, fête institutionnelle, le 8 décembre est devenu un événement touristique d’ampleur contribuant à la renommée internationale de Lyon. Chaque année, des milliers de promeneurs bravent le froid pour parcourir les rues, devenues piétonnes pour l’occasion, dans une atmosphère apaisée d’émerveillement, loin des liesses populaires estivales.
Mais revenons sur les origines des illuminations du 8 décembre : celles-ci sont à la fois liées au culte de la Vierge Marie et à son sanctuaire sur la colline de Fourvière.
140 : Les origines légendaires du culte marial à Lyon
Le culte de Marie à Lyon remonterait aux temps des premiers chrétiens : la légende raconte en effet que le premier évêque de Gaule et de Lyon, Pothin, arrivé d’Asie vers l’an 140, aurait été porteur d’une image très vénérée de la Vierge qu’il dépose dans ce qui deviendra la crypte de l’église Saint-Nizier. Cette légende nous est rappelée sur un vitrail de l’église Saint-Paul.
Le culte et l’attachement à la Vierge se retrouvent encore aujourd’hui dans les innombrables madones présentes en façades ou dans les angles des immeubles lyonnais.
1168 : La chapelle de Fourvière
Au Moyen-Age, à partir de 1168 est édifiée sur la colline de Fourvière une chapelle dédiée à Saint-Thomas Becket et à la Vierge Marie. L’emplacement choisi, exceptionnel, domine Lyon en direction de l’Est. Durant l’Antiquité, il accueillait le coeur de la ville romaine (le nom Fourvière viendrait du latin Forum Vetus, vieux forum). Parallèle intéressant, Notre-Dame de la Garde à Marseille est bâtie sur un promontoire qui dès 1214 accueille également une chapelle dédiée à la Vierge.
1643 : Le voeu des échevins
Le voeu des échevins de 1643 est sans doute le plus connu parmi les différentes doléances religieuses lyonnaises faites au cours des ages pour se prémunir religieusement des calamités affectant les lyonnais (peste, cholera, invasion autrichienne…).
Au XVIème et XVIIème siècles plusieurs épidémies de peste ravagent en effet régulièrement Lyon. Le 12 mars 1643, les échevins de Lyon et son prévôt (l’équivalent du Maire et de son conseil municipal) font un voeu : si la peste disparaît, ils érigeront à la Vierge deux statues (l’une sur le perron de la Loge du Change, l’autre sur le pont de Saône), et ils monteront à Fourvière chaque année, le jour de la Nativité (le 8 septembre), pour offrir au sanctuaire, au cours d’une messe, un écu d’or et sept livres de cire blanche.
L’épidémie aurait cessé le 8 septembre. Les statues furent érigées, et le pèlerinage annuel fut ponctuellement accompli, depuis le 8 septembre 1643 jusqu’en 1789. Il reprendra par la suite de manière discontinue. De nos jours, la municipalité perpétue toujours cette tradition.
En 1720, la peste ravage à nouveau Marseille et la vallée du Rhône, elle ne reviendra pas à Lyon, ce qui conforta le culte lyonnais dévolu à la Vierge.
Les illuminations du 8 décembre 1852
Dans les années 1850, la chapelle de Fourvière, héritée des temps médiévaux, est en mauvais état et souffre d’un espace exigu, au regard de sa fréquentation grandissante. Un nouveau clocher est alors projeté, qui doit accueillir en son sommet un statue de la Vierge, monumentale et dorée. Une souscription publique est ouverte en 1851 pour accomplir ces travaux. La statue doit être l’aboutissement sommital de la construction, et sa finition à l’or fin doit la faire resplendir au sommet de la colline. L’inauguration de la statue est prévue le 8 septembre 1852, date de la fête de la Nativité (commémorant par ailleurs le vœu des échevins de 1643).
Le chantier prend néanmoins beaucoup de retard en raison de conditions climatiques dantesques puisque des inondations sévissent dès la fin du mois de juillet 1852, atteignant même l’atelier du fondeur de la statue. On peut comprendre l’impatience des lyonnais, qui ayant contribué au financement de la réalisation de l’ensemble, voient alors l’inauguration repoussée du 8 septembre au 8 décembre.
La statue est finalement dévoilée le mercredi 8 décembre 1852, en grande pompe religieuse et avec une forte affluence de la population. Mais lors des cérémonies prévues durant toute cette journée, l’orage éclate vers midi, et la tempête redouble tout l’après-midi. Les illuminations de l’édifice et de l’esplanade prévus avec des feux de bengale et des inscriptions géantes enflammées semblent alors bien compromises.
Loin d’y voir un signe de mauvais augure, on envisage de reporter cette partie de la fête au 12 décembre. En fin d’après-midi, la tempête cesse toutefois, et de 18h à 20h dans un élan de ferveur que l’on dit spontané, les lyonnais vont illuminer les fenêtres de leurs habitations au moyen des lampions et de toutes sortes de dispositifs d’éclairage, parfois rudimentaires.
Dimanche 12 décembre 1852 ont lieu de nouvelles illuminations avec le concours des autorités religieuses et civiles. De nouvelles illuminations se poursuivent alors jusqu’au dimanche 19 décembre 1852.
Vers une fête profane
Dès 1853, une partie de la fête repose sur des animations profanes. Fête religieuse, le 8 décembre semble ainsi sans cesse revendiquer son origine populaire, oscillant entre croyances, spontanéité du peuple, accréditations officielles du pouvoir religieux ou civil.
Le sort des illuminations du 8 décembre sera très variable au cours du XXème siècle. Dans les années 1900, c’est un sujet de bataille entre cléricaux et anti-cléricaux. Les illuminations seront suspendues durant les deux guerres mondiales, et à partir des année 1960, elles ne sont plus encouragées par le pouvoir religieux. Cette tradition reprend dans les années 1980.
Dans les années 1990, la Ville de Lyon lance un Plan Lumière qui vise l’illumination des bâtiments publics, pour donner une image plus vivante à la ville. Elle développe en parallèle le concept de la Fête des Lumières, événement civil et touristique qui ne cessera dès lors de gagner en affluence, avec la participation d’entreprises démontrant tout leur savoir-faire technologique.